Bibliothèque rayon "Voix d'Asie"

Légendes des origines du Weiqi

Les références légendaires aux origines du Weiqi ne manquent pas. Il s'agit des grands classiques de la littérature chinoise ancienne. Le Zizhi Tongjian Gangmu et ses commentaires, section dédiée à Yao, chapitres 70 et suivants, Shang Hai jing, chapitre XII, Lüshi Chunqiu, ch. XX-4, Shu jing V, Shi Ben, Lu Shi, etc. Il existe plusieurs versions de cette génèse du jeu favori des stratèges mais deux d'entre elles se distinguent comme venant chacune d'une source différente. Dans la première, le Pôle Sud et le Pôle Nord, ayant pris la forme de deux immortels se retrouvent pour jouer au Weiqi. Ce jeu leur permet de décider du sort des êtres. Le Nord est le Yin, noir. Il décide de la mort tandis que le Blanc, Yang, décide de la vie. Ce schéma narratif très simple est celui qui prévaut au Temple de la montagne du Weiqi (Qipan shan). L'autre légende est plus complexe, il s'agit d'un de ces mythes fondateurs que l'on retrouve dans les grandes civilisations. Elle concerne le souverain mythique Yao. Il épousa une charmante jeune femme qui engendra un fils. Les conditions de cette naissance relèvent du fantastique pur. Une nuit, elle eut un rêve impressionnant. Elle vit un oiseau merveilleux qui poussa un cri aussi épouvantable que le tonnerre. Peu de temps après, elle se sentit faiblir et tomba enceinte. Au dixième mois, un enfant étrange naquit. Ses cris épouvantaient tout le voisinage et sa force progressait de façon surnaturelle. En prenant de l'âge, il devint vicieux et arrogant. Il regroupait autour de lui tous les mauvaius sujets de l'empire. C'était au temps du déluge et Yao avait d'autres préoccupations que de discipliner un fils récalcitrant. On l'appelait Dan Zhu, ce qui veut dire "cinabre rouge". Il se fit construire un bâteau et parcourait les étendues d'eau avec ses complices, accomplissant les pires forfaits et ajoutant ses crimes aux malheurs des temps. Mais, vint un temps où Yao et ses ministres purent maîtriser les eaux et il devint difficile pour Dan Zhu de naviguer à son gré. Il s'irrita et décida de monter le bateau sur roues. Sa mère se rendit compte des troubles que son fils occasionnait partout et le rappela à elle. Ce fut le palais de Yao qui devint un lieu de désordre et de débauches. La pauvre mère dut faire appel à son mari, l'empereur Yao. Le souverain apporta un jeu de Weiqi et provoqua son fils pour une partie qui s'avéra passionnante. Dan Zhu s'absorba dans son jeu et oublia ses fredaines passées. Cependant Yao n'avait pas que ça à faire et il devait abandonner le jeu pour s'occuper de son empire. Dan Zhu retrouvait alors ses mauvais penchants. Finalement, Yao désigna un autre héritier. Il exila Dan Zhu chez un peuple barbare, les San Miao. Bientôt, sous sa direction, ils se révoltèrent. Ce fut la guerre. Yao maîtrisa facilement ses ennemis et proposa son pardon à son fils, mais Dan Zhu, plutôt que de se soumettre, se jeta dans un fleuve. Son orgueil était trop grand.

Nevio & Serge Tokyo, 22 mars 1999